Pourquoi restaurer les cours d'eau ?

Pourquoi restaurer les cours d'eau ?

L’une des raisons ayant mené à l’effacement des barrages de la Sélune est la restauration de la continuité écologique du cours d’eau. Nous revenons ici sur ce que représente la continuité écologique et sur les différentes méthodes utilisées pour la restaurer et la maintenir.

Comprendre la notion de continuité écologique

La continuité écologique des cours d’eau est actuellement définie par « la libre circulation des organismes vivants et leur accès aux zones de reproduction, de croissance, d’alimentation ou d’abri ainsi que le transport naturel des sédiments d’amont en aval et d’une rive à l’autre ». Ainsi, lorsque l’on parle de continuité écologique dans les cours d’eau, on parle de continuité biologique, sédimentaire et hydrologique.

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La continuité écologique © Office International de l'Eau

Cette continuité existe dans deux dimensions :

  • Une dimension longitudinale, amont-aval, illustrée notamment par les migrations vers l’amont (montaison) et vers l’aval (dévalaison) de nombreuses espèces de poissons migrateurs.
  • Une dimension latérale, d’une rive à l’autre, du lit majeur au lit mineur, illustrée par exemple par les interactions entre milieux aquatiques et terrestres et la succession d’espèces animales et végétales qui en découle.

L'impact des obstacles sur les cours d'eau

La présence d’obstacles dans les cours d’eau (barrages, écluses, seuils, moulins) ou sur leurs rives (digues, protection des berges) entrainent une fragmentation des cours d’eau et une rupture de la continuité écologique, autrement dit, une discontinuité écologique. Cette discontinuité peut être plus ou moins importante. Un moulin, qui n’occuperait qu’une partie du cours d’eau, entrainera une discontinuité seulement mineure de celui-ci, bien qu’existante. En revanche, la présence d’obstacles majeurs tels que les barrages va empêcher la migration, la reproduction et l’établissement de nombreuses espèces, et créer des lacs artificiels d’eau désormais stagnante. Ces changements vont ainsi en entrainer d’autres, en chaine, dans l’écosystème fluvial et son bassin versant :

  • Chute de la biodiversité
  • Perturbation du réseau trophique
  • Modification morphologique et sédimentaire des berges et du cours d'eau
  • Débordements en périodes de crues (obstacles latéraux)
  • Dégradation de la qualité de l'eau
  • Diminution des échanges entre nappes souterraines et rivières
  • Instabilité des écosystèmes (perte de résilience)
  • etc.
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La discontinuité écologique © Office International de l'Eau

Les solutions pour restaurer la continuité écologique

La continuité écologique des cours d’eau a été définie par la Directive Cadre sur l’Eau en 2000 comme un élément contribuant au bon état écologique des cours d’eau (Annexe V, Directive 2000/60/CE). Depuis, de nombreux textes ont repris cette notion de continuité écologique. C’est le cas notamment de la loi sur l’eau et les milieux aquatiques de 2006 (loi française de traduction des objectifs de la DCE), et du plan national de gestion pour l’anguille. C’est cependant suite à la mise en place d’une trame verte et bleue par les lois Grenelle de 2009 et 2010, que la restauration de la continuité écologique des cours d’eau est devenue une priorité. En France, elle se traduit notamment par la mise en place, dès 2009 d’un plan national de restauration de la continuité écologique.

C’est ainsi qu’en France, depuis 2009, l’Office Français de la Biodiversité (précédemment ONEMA devenu AFB puis actuellement OFB) accompagné des Agences de l’Eau, dressent un inventaire des obstacles présents sur les cours d’eau. Cet inventaire est accompagné d’une évaluation de l’usage et de l’impact de ses obstacles. Ce diagnostic détaillé permet ainsi de proposer différentes solutions de restauration « pour annuler ou a minima réduire les impacts négatifs liés à la présence d’obstacles sur les cours d’eau » (voir Brochure ONEMA). Ces solutions vont du simple aménagement de l’obstacle à son effacement complet.

L'abaissement

Cette solution permet de conserver une partie de l’obstacle en place en proposant soit une réduction de sa hauteur, soit l’ouverture d’une brèche localisée pour permettre la libre circulation du cours d’eau et des espèces aquatiques. Cette solution est communément envisagée pour les ouvrages à fort intérêt patrimonial ou paysager comme les moulins. Elle permet ainsi de concilier continuité écologique et conservation du patrimoine.

L'ouverture des vannes

Certains obstacles devenus obsolètes (vieux moulins ou bâtiments hydrauliques désaffectés) conservent cependant un intérêt patrimonial fort. Leur effacement complet ou partiel (abaissement) n’est pas envisageable. Pour cela, il peut être proposé d’ouvrir de façon permanente ou saisonnière les vannes. Cette solution permet de conserver l’ouvrage d’intérêt tout en rétablissement la continuité écologique du cours d’eau.

L'installation de dispositifs de franchissement

Lorsque l’objectif principal est la restauration de la continuité piscicole, l’installation de dispositifs de franchissement de l’obstacle par les poissons peut être envisagée. Il existe de nombreux types d’aménagements d’ouvrages pour permettre aux poissons de monter ou descendre les cours d’eau : passes à poisson techniques ou naturelles, ascenseurs, barrières comportementales à signal lumineux, sonore ou électrique. Bien qu’utiles, ces installations sont toutefois spécifiques à certaines espèces et nécessitent un entretien régulier et onéreux. Leur mise en place dépend également de nombreux facteurs locaux et logistiques, limitant parfois leur efficacité. De nombreux travaux de recherche et développement sont en encours pour optimiser ces méthodes.

L'interruption des opérations de maintenance

Pour certains obstacles, l’effacement se fait de manière naturelle en lien avec leur vétusté, et l’érosion naturelle du milieu (par ex : crues qui emportent l’ouvrage laissé à l’abandon). Pour ce cas particulier, aucune intervention n’est mise en place mais des mesures d’accompagnement de leur effacement naturel sont assurées.

L'effacement complet

Il s’agit du moyen le plus efficace pour restaurer la continuité écologique des cours d’eau. L’effacement complet est recommandé notamment pour des obstacles abandonnés, vieillissants, sans usage et sans intérêt patrimonial ou paysager majeur. Cette solution est habituellement accompagnée d’une remise en état du cours d’eau afin d’accompagner le processus de restauration du système. Par exemple, de nombreux ouvrages hydroélectriques construits au début des années 1910-1920 sont désormais vieillissants, présentant des problèmes de sécurité et de rentabilité. Dans ce contexte, les projets d’effacement sont de plus en plus nombreux dans le monde. Néanmoins, l’effacement complet des obstacles est également l’une des solutions les plus controversées. Pour cela, il est donc nécessaire de mettre en place une gestion d’ensemble et une bonne communication du projet de restauration.

Pour en savoir plus sur les actions de l'OFB et des Agences de l'Eau, consultez notre page "Pour aller plus loin...".