Le retour du saumon Atlantique

Le retour du saumon Atlantique

Le saumon atlantique était présent dans la vallée de la Sélune bien avant la construction des barrages. Sa migration était entravée par la présence des barrages. Où se trouve-t-il aujourd’hui ?

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Saumon atlantique (Salmo salar) © Timothy Knepp

Le saumon atlantique (Salmo salar) est un poisson migrateur amphihalin qui naît en rivière, rejoint la mer pour se nourrir et grandir durant 1 à 2 ans, avant de retourner en rivière pour se reproduire et mourir. Cette migration a lieu, selon les individus, au printemps et en été. Les saumons quittent ainsi le milieu marin pour achever leur cycle de vie dans l’eau douce des rivières. Avant de trouver des partenaires et des zones propices à la reproduction (les frayères), les saumons se reposent dans les zones profondes et fraîches des rivières jusqu’à l’automne où ils reprennent leur remontée. Sous nos latitudes, le saumon se reproduit entre fin novembre et début janvier.

Des saumons équipés pour suivre leurs déplacements dans la vallée de la Sélune

Depuis 2019, dans le cadre d’un projet de recherche sur l’utilisation des habitats par le saumon atlantique, des géniteurs de saumons en âge de se reproduire sont équipés d’émetteurs radio lors de leur remontée en rivière, en été. Les détails de ce projet de recherche et ses premiers résultats sont disponibles ici.

Le saumon atlantique recolonise la vallée de la Sélune

Les saumons passent l’été dans des zones profondes à l’aval du bassin versant. Ils y attendent les augmentations de débit à l’automne pour entamer l’ultime migration vers l’amont, parfois dans les affluents, à la recherche d’habitats moins profonds aux écoulements plus turbulents pour se reproduire. Jusqu’à présent, leurs déplacements étaient limités à la partie aval du bassin versant, les barrages étant infranchissables. Ils se reproduisaient donc principalement sur la partie aval de la Sélune et sur les affluents comme l’Oir et le Beuvron, ou même choisissaient-ils de repartir vers des rivières voisines de la baie.

Depuis 2022 et le début des travaux de démantèlement de la Roche-Qui-Boit, certains saumons ont commencé à explorer la partie amont du bassin versant de la Sélune. Parmi les 18 saumons équipés d’émetteurs en 2022, deux géniteurs ont été détectés à l’amont des anciens barrages. L’un d’entre eux est resté au niveau de Lapenty, à plus de 20 km à l’amont de La-Roche-Qui-Boit, et ce pendant toute la période de reproduction. Les données enregistrées par l’émetteur révèlent une activité intense fin décembre qui pourrait correspondre à une activité de reproduction.

D’autres outils de suivi sont mobilisés sur la Sélune afin de comprendre et suivre le retour du saumon atlantique : caméra acoustique, suivis ADNe, pêche scientifique à l’électricité. Ces outils montrent que le saumon atlantique était bien présent avant l’effacement des barrages dans les zones aval.

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Cartographie des stations fréquentées par le saumon Atlantique avant et après le démantèlement des barrages. Les stations violettes représentent les nouvelles détections
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Tacon (0+) identifié à l'amont des anciens barrages de la Sélune en 2023 © J.Tremblay

Chaque année, avant l’effacement des barrages, une population de 200 à 700 saumons adultes était évaluée en aval des ouvrages. En 2023, des jeunes saumons nés au printemps 2023 et donc issus de la reproduction de l’hiver 2022-2023 ont été retrouvés à l’amont des anciens barrages. Il s’agit d’un petit nombre d’individus car l’année 2022 a été marquée par une faible abondance de géniteurs de saumons partout en France et une forte sécheresse et des températures élevées dans l’eau pour les saumons. Néanmoins, cela signifie que le blocage identifié auparavant par la présence des barrages est levé et que les saumons ont maintenant la possibilité de recoloniser l’amont du bassin versant de la Sélune, et de s’y reproduire. Les années à venir, puissent-elles présenter des conditions climatiques propices à la remontée du saumon, nous permettront de mieux suivre leur recolonisation.

Les saumons de la Sélune : une population à l'échelle de la baie du Mont Saint-Michel

Les saumons étaient absents depuis plus d’un siècle à l’amont des barrages, comment peut-on expliquer leur retour ?

Les saumons que l’on retrouve sur la Sélune appartiennent, en réalité, à une population qui se répartit dans plusieurs cours d’eau de la Baie du Mont Saint-Michel : la Sée, le Couesnon, et les affluents de la partie aval de la Sélune comme l’Oir ou le Beuvron. Si le saumon a la capacité de reconnaître sa rivière natale pour aller s’y reproduire (pour en savoir plus : page Bretagne grands migrateurs), certains individus ont un comportement plus erratique et explorateur, permettant de coloniser de nouveaux habitats. Ainsi, les barrages ayant disparu, l’amont de la Sélune se recolonise naturellement par des saumons « explorateurs » venant de ces cours d’eau de la baie Mont Saint-Michel.